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Arboretums de Corrèze

Arboretums de Corrèze

Les forêts sont omniprésentes en Corrèze puisqu’elles recouvrent environ 45 % du territoire, ce qui en fait un des départements les plus boisés de la métropole. Un département riche de cette ressource dont tout le monde s’accorde à dire qu’elle est une arme contre le dérèglement climatique car susceptible de capter le CO2 (ce que d’aucuns contestent d’ailleurs, arguant du fait que le bilan global serait, contre toute attente, finalement nul ou négatif, en tout cas pas plus favorable que celui d’une simple prairie !)

Difficile en tout cas de parcourir la Corrèze, que ce soit à pied ou en voiture, sans traverser ou longer un bois, une futaie !

La plupart des routes sont bordées d’arbres ce qui constituerait, paraît-il, un risque majeur, car susceptible de transformer la moindre perte de contrôle en péril mortel. La menace ayant été identifiée dans les années 60, une action administrative d’envergure fut lancée derechef, visant à dégager les abords de nos routes, ce qui aurait eu pour effet de faire disparaître en un rien de temps une richesse qui avait mis plusieurs dizaines d’années à pousser …

Et il fallut une lettre du Président Georges Pompidou à son premier ministre Jacques Chaban-Delmas en 1970, pour s’en émouvoir et tempérer les ardeurs des tronçonneurs de l’ex-DDE :

«La sauvegarde des arbres plantés au bord des routes – et je pense en particulier aux magnifiques routes du Midi bordées de platanes – est essentielle pour la beauté de notre pays, pour la protection de la nature, pour la sauvegarde d’un milieu humain.

… Que l’on se garde donc de détruire systématiquement ce qui en fait la beauté [de la France] ! »

On n’ose pas imaginer ce qu’il pourrait ressentir s’il devait traverser aujourd’hui le territoire, où presque aucun endroit n’est épargné par des forêts de pylônes d’éoliennes, des forêts dont la laideur le dispute à l’inefficacité !

Mais Georges Pompidou ne fut pas le seul à apprécier et défendre les arbres et les forêts. D’autres, avant lui et après lui, tout aussi illustres, ont vanté ce milieu incomparable :

« La forêt est une entité singulière, toute de bonté et de bienveillance infinies, qui ne demande rien pour vivre et propose généreusement les produits qu’elle élabore : elle donne sa protection à tous les êtres et offre même son ombre au bûcheron qui vient l’abattre. »

(Bouddha – vers -600 avant JC)

« Forêt silencieuse, aimable solitude,
Que j‘aime à parcourir votre ombrage ignoré !
Dans vos sombres détours, en rêvant égaré,
J‘éprouve un sentiment libre d‘inquiétude ! »

(François-René de Chateaubriand, Tableaux de la nature, 1784-1790)

« Quand je dirige ma promenade vers l’une des forêts voisines : Les Dhuits, Clairvaux, Le Heu, Blinfeix, La Chapelle, leur sombre profondeur me submerge de nostalgie; mais soudain, le chant d’un oiseau, le soleil sur le feuillage ou les bourgeons d’un taillis me rappellent que la vie, depuis qu’elle parut sur la terre, livre un combat qu’elle n’a jamais perdu. »

(Charles de Gaulle – Mémoires de guerre, Le Salut 1944-1946)

« Les hautes futaies élèvent l’esprit et la marche le met en mouvement. Quand je rentre dans notre maison, je n’ai plus qu’à l’écrire. »

(Charles de Gaulle – date inconnue)

« L’immense forêt qui s’étendait devant eux n’était pas immobile, une brise légère faisait onduler les feuilles, et ce très léger mouvement était encore plus apaisant que ne l’aurait été une immobilité parfaite, la forêt semblait animée d’une respiration calme, infiniment plus calme que n’importe quelle respiration animale, au-delà de toute agitation comme de tout sentiment, différente pourtant du minéral pur, plus fragile et plus tendre, intermédiaire possible entre la matière et l’homme, elle était la vie dans son essence, la vie paisible, ignorante des combats et des douleurs. »

(Michel Houellebecq Anéantir 2021)

Si la forêt est ce havre de paix et d’inspiration que décrivent ces auteurs, il est de première urgence de quitter notre habitat urbain pour s’immerger dans cet écosystème apaisant; pour se ressourcer. Au sens propre : revenir à la source, aux racines de ce que nous sommes, des enfants de la nature comme le suggère le paléoanthropologue Pascal Picq lorsqu’il dit : « L’humain ne descend pas du singe, il descend de l’arbre. »

Les forêts : il en est de célèbres comme celles de Tronçais et de Fontainebleau, d’autres mythiques telles Brocéliandre :

D’autres encore, connues et réputées pour avoir vu passer des personnages tout aussi éminents que le druide Panoramix :

À défaut de visiter ces forêts de légende, hors de portée d’une sortie ordinaire, on peut commencer par découvrir les essences les plus courantes – mais aussi les plus spectaculaires – en visitant des arboretums. Il en existe plusieurs sur le département, pour beaucoup situés en Haute-Corrèze.

(La liste qui suit n’est pas exhaustive)

Barsanges (commune de Pérols-sur-Vézère)

Initié par Marius Vazeilles après la première guerre, cet arboretum est abandonné depuis plusieurs années. Restent en place les panneaux indicateurs et quelques arbres remarquables qu’on a peine à identifier en l’absence quasi générale de signalétique .. mais il y a des exceptions …

   

 

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Belvédères, points de vue et tables d’orientation

Belvédères, points de vue et tables d’orientation

Admirer le paysage : voilà une occupation reposante, gratuite et agréable s’il en est.

Pour pratiquer cette activité récréative, le plus simple consiste peut être à le découvrir depuis un point haut; et c’est d’ailleurs là que sont implantés les points de vue et belvédères qui parsèment le territoire.

Ces petits édifices permettent de découvrir un peu tous les horizons de la Corrèze et parfois même d’apercevoir ce qui se passe chez nos voisins, gens du Puy de Dôme ou du Cantal

ils sont, assez logiquement, nombreux sur la montagne Corrézienne, suivent de près le tracé de la Dordogne ce qui permet d’admirer les lacs de retenue des barrages hydroélectriques de Bort, Marèges, l’Aigle et le Chastang. De façon plus inattendue, ils sont assez nombreux sur la Basse-Corrèze, tous situés sur les crêtes qui vont de Donzenac à Juillac et qui surplombent (légèrement) le bassin de Brive.

Ils constituent pour la plupart un point d’étape ou un terminus de promenade et sont un moyen de découvrir le pays que cette position surélevée permet d’apprécier, un peu comme si on le survolait en avion ou Ulm, sans pour autant prendre le moindre risque et sans consommer une goutte de pétrole !

Le site tourismecorreze.com en recense une quarantaine :

https://www.tourismecorreze.com/fr/tourisme/points_de_vue_amenages_et_tables_d_orientation-carte.html

En voici quelques-uns que j’ai visités au hasard de promenades :

Ayen

Table circulaire en lave émaillée sur soubassement rocheux

Une des tables les plus basses en altitude (377 m) avec celle de Juillac, mais aussi l’une des plus accessibles.

Le texte qui figure sur la table précise qu« elle est érigée à l’emplacement d’un château féodal occupé par les soldats du vicomte de Limoges ; il fut le siège de nombreux combats au cours de la guerre de 100 ans, puis il fut rasé par ordre royal. C’était une des citadelles qui avec le château d’Yssandon surveillait la région et la protégeait des invasions« 

Chaumeil table d’orientation du Suc au May

Table circulaire en lave émaillée sur soubassement rocheux

Le Touring Club de France a participé au financement de cette table qui a été inaugurée en 1935 en la présence de M. Henri de Jouvenel.  C’est apparemment la plus ancienne du département.

Voici le compte-rendu qu’en fit un journal (Revue du Centre Ouest économique et touristique, parue en sept-oct 1935) :

 

Le dimanche 25 août [1935 donc], eu lieu, sous la présidence de M. de Jouvenel, ambassadeur, ancien ministre, l’inauguration de la table d’orientation des Monédières. Cette table, placée au Suquet du May, à 911 mètres d’altitude, est la 132ème placée en France et dans l’Afrique du Nord. Elle n’est pas sur le point culminant des Monédières, mais de cet endroit la vue est magnifique et aussi belle qu’on puisse le demander : elle s’étend sur toute la Corrèze et les six départements qui l’entourent, sans qu’aucune levée de terrain ne masque les environs. Panorama superbe par temps clair et qui récompense largement le touriste d’une ascension facile.

La cérémonie s’est déroulée par beau temps, pas très clair cependant, les brumes violettes de l’horizon dissimulent au grand regret des nombreux assistants, des monts du Cantal et les autres points lointains.

Pendant la cérémonie, un avion de l’aéro-club du Limousin a survolé les Monédières et a laissé tomber une gerbe de fleurs devant la table d’orientation. Le geste émouvant a été salué par les applaudissements des assistants.

La table est placée sur un socle hexagonal en pierre de Volvic. La gravure est sur lave émaillée, elle est due à l’art consommé de M. Seurat, directeur de la fabrique de lave émaillée d’Auvergne. Elle représente la carte de la région et le panorama, dressé par M. Billard, professeur à Tulle. Elle est placée sur un point géodésique de premier ordre du service géographique de l’armée déterminé en 1839, qui se trouve sur la ligne droite de Perpignan à Dunkerque. Trois plaques émaillées fixées sur le pourtour indiquent le nom des souscripteurs, le point exact où elle est et la date de l’inauguration. Elle est d’un accès facile, les voitures de tourisme peuvent facilement u arriver.

À midi, un banquet de 150 couverts était servi à l’hôtel Picard, à Saint-Augustin. À la table d’honneur on remarquait Mme et M. de Jouvenel, M. le Préfet de la Corrèze, M. le docteur Lafage, conseiller général de la Corrèze …

au dessert des discours ont été prononcés …

Puis successivement, la « Lyre Corrézienne«  et « l’École de Ventadour«  se sont fait applaudir.

En fin à 21 heures, un magnifique feu d’artifice fut tiré.

Extrait d’un discours (de M. Gabiat, à l’époque ancien député de la Haute-Vienne) *:

« … je ne pouvais rester insensible à l’attractif appel de l’Éricïnéenne** région des Monédières, nous invitant à voir ses monts, en pleine splendeur estivale, et déjà somptueusement parés de leur très symbolique fleur de Bruyère …

et aussi cet autre appel de l’Airelle-Myrtille, aux baies finement acides et rafraîchissantes, qui à l’instar Virgilien des vignes du Mont-Ida, parfois se dissimulent, en cette auguste brousse, plus souvent s’y épanouissent copieusement, sous le direct et avide regard des gourmets …« 

* au vu de la teneur du discours, on peut effectivement penser qu’il fut prononcé après le repas !

** famille botanique qui comprend la bruyère, le rhododendron, l’azalée, etc

Couffy sur Sarsonne, Puy du Vareyron

Table circulaire en lave émaillée sur soubassement rocheux. La vue sur le massif du Sancy et le Puy de Dôme vaut le détour !

Juillac, table d’orientation du Chatenet

Jolie table émaillée de forme carrée aux coins rognés; de ce point de vue, on distingue vers l’Est, la faille ardoisière qui marque la limite entre le bassin de Brive et le plateau corrézien et, au loin, les sommets des Monédières. Vers le Sud, on découvre le bassin de Brive entouré par quelques reliefs qui émergent tels qu’Ayen ou Yssandon,

Liginiac, belvédère du barrage de Marèges 

Conçu par l’Ingénieur André Coyne (grand spécialiste de ces ouvrages), le barrage de Marèges construit au début des années 1930 est un des plus grands d’Europe, sinon le plus grand : 90 m de hauteur, 187 m de développement ; les fondations profondes de 50 mètres (!) font que sa hauteur réelle est de 140 m, donc plus haut que la pyramide de Chéops (mais moins visité sans doute). À l’époque quatre groupes turbo-alternateurs de 37,5 MW fabriquent l’électricité. Une électricité destinée avant tout à la compagnie ferroviaire Paris-Orléans (compagnie qui fusionnera avec d’autres en 1938 au sein de la SNCF) qui en est le commanditaire et qui servira à électrifier le tronçon entre Vierzon et Brive. L’économie en charbon est considérable et la vitesse et la fiabilité des trains s’en trouvent aussi bien améliorés.

Le barrage est inauguré le 5 octobre 1935 par le ministre des travaux publics, M. Laurent Eynac, en présence du président de la compagnie P-O, de M. Queuille et autres personnalités, mais en l’absence notable de M. de Jouvenel, décédé la veille et auquel le ministre rendra hommage dans son discours; un discours qui évoque le compétition industrielle avec les pays voisins, dont l’Allemagne : « Marèges, barrage voûté, est actuellement le plus grand d’Europe, constatation qui n’est pas vaine à une époque où la force du sentiment national chez les peuples les oppose même dans le domaine technique en une compétition pacifique à la fois et passionnée, qui est souvent profitable.« 

Le barrage est en effet original dans sa conception puisque conçu comme une voûte qui transmet la poussée de la masse d’eau retenue sur les deux versants rocheux des rives.

Le compte-rendu journalistique exprime quand même un certain doute quant à l’impact environnemental de cet ouvrage puisqu’il écrit : « Un jour, hélas ! L’homme par son génie ou par sa malfaisance, mais en tous cas pour les besoins de sa civilisation, décida d’asservir et de façonner le travail de la nature« 

Extraits tirés de la Revue du Centre Ouest économique et touristique, parue en sept-oct 1935

Liginiac, le puy de Manzagol

Table circulaire en lave émaillée sur soubassement rocheux, financée par le TCF.

Comme à Chaumeil et Couffy, la pierre de lave provient des usines Seurat à St Martin près Riom

La végétation s’est fortement développée autour du site et tout un secteur est à l’heure actuelle devenu inaccessible au regard.

Meymac, tour panoramique du Mont Bessou

Légèrement en contrebas des antennes géantes de radiodiffusion [ 200 m de hauteur ! ], la tour panoramique du mont Bessou, haute de 24 m permet d’atteindre l’altitude symbolique des 1000 mètres (Ceci reste très théorique, car le site d’implantation n’est pas exactement sur le point le plus haut…)

Monestier Port Dieu, site de la Vie

Une vue magnifique sur la retenue du barrage de Bort-les-Orgues qui s’étend sur une dizaine de kilomètres et dont la largeur peut atteindre jusqu’à 1 km. On distingue le château de Val (avec des jumelles c’est mieux), haut lieu du tourisme.

Le barrage de Bort est l’un des plus imposants parmi ceux de la Dordogne : 125 m de hauteur, près de 400 m de longueur de crête, une puissance installée de 240 MW. Il est en fonction depuis 1952.

Roche le Peyroux, belvédère de Gregeolles

Une vue un peu vertigineuse sur la confluence Diège-Dordogne. Ce belvédère est situé juste en face du site de St Nazaire, un peu en amont du barrage de Marèges.

St Exupéry les Roches

Table circulaire en lave émaillée sur soubassement rocheux ; comme à Chaumeil, Couffy et Liginiac, la pierre de lave provient des ateliers Seurat à St Martin-près-Riom (63).

La présence de la végétation, est bien rendue sur le dessin de la table.

Saint Martin la Méanne, barrage du Chastang

Un belvédère d’où l’on peut admirer le barrage du Chastang, vu de face.

Le potentiel hydro-électrique de la Dordogne est exploité à plein puisqu’on dénombre trois barrages en amont (Bort, Marèges, l’Aigle) et un en aval, le Sablier. Les affluents ne sont pas oubliés puisqu’on voir quelques barrages de taille plus modeste à Neuvic et Marcillac la Croisille par exemple.

 

Saint Setiers, Mont Audouze

Au beau milieu du plateau de Millevaches, cet endroit est particulier puisque selon que le regard porte d’un côté ou de l’autre, on découvre le bassin de la Dordogne, ou bien celui de la Loire ou plus précisément une partie du bassin de la Vienne qui prend sa source en ces lieux : on est sur la ligne de partage des eaux entre ces deux bassins.

Deux points de vue sont d’ailleurs aménagés, l’un dirigé vers le Sud-Est et la chaîne des puys, les Monts du Cantal et le bassin versant de la Dordogne; le panneau d’information précise la localisation des sources de la Diège, du Chavanon, de la Sarsonne, de la Dordogne, de la Triouzoune et de la Luzège.

À peu de distance, le second point de vue nous fait découvrir le bassin versant de la Vienne. Le lieu est joliment aménagé et permet de profiter agréablement de la vue. Et si l’on ne distingue pas les sources, cachées quelque part dans la végétation, des panneaux d’information permettent de comprendre l’hydrogéologie de ce bassin. Une grande fresque sur émail, décrit la géologie sur toute la longueur du parcours entre St Setiers et la confluence Vienne-Loire du côté de Chinon 370 km en aval.

La Vézère, autre rivière importante, prend sa source un peu plus au sud.

https://www.lamontagne.fr/ussel-19200/loisirs/changement-de-cap-cette-semaine-direction-saint-setiers-sur-le-plateau-de-millevaches_12034742/

 

Sarran, table d’orientation du puy de Sarran

Selon le panneau d’information, le site est à l’origine un calvaire, datant de 1883; les croix en bois ont été remplacées en 1939 par des croix en béton qui en font toute l’originalité. Un panneau d’orientation de forme trapézoïdale permet de d’identifier les différents éléments du paysage.

 

les Sully et autres arbres remarquables

les Sully et autres arbres remarquables

La forêt et les bois ont joué un grand rôle dans l’histoire et l’homme entretient depuis toujours une relation bien particulière avec l’arbre; celui-ci exprime toute la force du monde végétal et a tenu une place importante, économique et symbolique, dans les sociétés humaines :

– il constitue un moyen de chauffage très facile à trouver et à enflammer et entre(entrait) dans la fabrication de meubles (encore aujourd’hui pour les cercueils …) et la construction navale jusqu’à l’avènement des aciers

– c’est sous un chêne que Louis XI rendait la justice,

– c’est aussi sous un arbre à palabres que se tiennent les réunions dans certaines communautés africaines

– les druides (c’est attesté dans Astérix chez les Goths) cueillaient le gui sacré sur les chênes

– Il symbolise la vie de la famille au travers de l’arbre généalogique

On retrouve ce lien au travers de nombreux toponymes ou patronymes, dérivés de noms gaulois ou latins désignant diverses espèces :

fraxinus le frêne → Fraisne, Le Fresne, Frenay, Fraisse ou Fraysse, Freche, Freyssinet

sylva : la forêt →sylvestre, sylviculture, prénom Sylvain

limo, l’orme en gaulois, à l’origine de l’appellation lemovices (peuples du Limousin)

casteneum le châtaignier → Chastang, Chastaing, Castan, Castain

vernos l’aulne en gaulois → verne, vergne, lavergne

Son rôle écologique est maintenant avéré : l’arbre constitue un acteur majeur dans le cycle du carbone

La forêt est omniprésente en Corrèze et le moindre déplacement sur route ou par le rail nous le confirme : difficile de trouver des lieux d’où l’arbre est absent.

Si en France environ 30 % du territoire est boisé, ce taux atteint les 45 % chez nous delon un inventaire de l’IGN 2009-2013.

La cartographie montre que la densité forestière est à son maximum sur le plateau de Millevaches et tout le long de la vallée de la Dordogne.

Les essences les plus répandues sont le chêne (pédonculé quercus robur et rouvre ou sessile quercus petraea), le châtaignier et le pin douglas; arrivent ensuite le hêtre, l’épicéa et le bouleau; les feuillus sont assez nettement majoritaires même si ce n’est pas forcément l’impression première que l’on peut avoir en parcourant le territoire.

Avec autant de variétés, tous les goûts sylvicoles peuvent donc être satisfaits et chercher un coin d’ombre par une journée caniculaire est une quête qui peut être facilement satisfaite.

L’arbre fait partie du paysage et le structure; on le trouve aussi en dehors des forêts, le long des routes où il jouait un rôle protecteur pour le voyageur qu’il abritait tant du soleil que des précipitations, ainsi qu’au milieu des villages où apporte sa fraîcheur et contribue à aménager l’espace. Dans ces deux cas, il constitue un élément important du patrimoine historique et culturel français.

Historiquement, après les périodes de défrichage du moyen âge, les souverains prirent conscience de l’importance économique du bois et entreprirent de reboiser le territoire. Ainsi en 1552, Henri II ordonna « à tous les seigneurs hauts justiciers et tous manants et habitants des villes, villages et paroisses, de planter et de faire planter le long des voiries et des grands chemins publics, en lieux qu’ils verront plus commodes et à propos, si bonne et grande quantité d’ormes qu’avec le temps, notre royaume puisse s’en voir suffisamment et abondamment pourvu« 1. Cette volonté politique fut poursuivie et amplifiée sous les règnes qui suivirent, en particulier celui d’Henri IV et de son ministre Sully. Ce dernier aurait donné une impulsion nouvelle à ce projet en ordonnant en 1598 la plantation d’arbres le long des « grandes routes de France, et dans chaque village au devant les églises« , sur les places publiques, arbres dont beaucoup, plantés à cette époque, furent désignés sous le nom de Sully (ou Rosny)2,3 ; ils constituaient un point de ralliement où se rassemblaient les paroissiens à la sortie de la messe.

On retrouve trace de ces plantations vieilles de 400 ans, chênes, ormes ou tilleuls, dans plusieurs villages de Corrèze. Pour ceux qui subsistent, leur grand âge fait que l’on a affaire à des arbres majestueux et dont les dimensions (et notamment leur circonférence) sont hors-normes. Ils sont pour la plupart situés sur le plateau de Millevaches et les Monédières et assez souvent signalés à l’attention des curieux.

Voici un échantillon de ces Sully et de quelques autres arbres remarquables que l’on peut découvrir en sillonnant les campagnes corréziennes (et qu’on ne trouve pas ailleurs bien sûr). Si vous devez n’en voir qu’un, je vous recommande de vous arrêter sur l’aire des Sully à Monestier-Merlines.

Le panneau précise la circonférence : 5.80 m

Le chêne de l’Anglais à Sarroux – St Julien Près Bort

À Tarnac, sur la place (hélas envahie par les voitures) trônent deux chênes magnifiques :

La Montagne leur a consacré un article en 2014 :

https://www.lamontagne.fr/tarnac/vie-pratique-consommation/2014/12/27/deux-chenes-charges-dannees-et-dhistoire-ornent-les-espaces-publics-de-tarnac_11273854.html

 

Sur la commune de Le Jardin, un chêne de Sully qui a donné lieu à un découpage cadastral très original :

On peut en découvrir bien d’autres en parcourant le territoire : à Bellechassagne (au vu du nom, c’est un peu normal), Chamboulive, Chaveroche, Courteix, Maussac, St Hilaire Luc, St Rémy, Vigeois, Vitrac sur Montane, etc

Certains n’ont pas survécu à l’usure du temps (ou à l’homme) : c’est le cas par exemple à Bugeat, Juillac, Objat, Troche …

Et puis, il nous reste de magnifiques hêtres à admirer en bordure de routes, du côté de Bugeat : c’est « la route des Hêtres » :

1 Dissertations féodales t1 Henrion de Pansey1789

2 Mémoires d’Agriculture, d’économie rurale et domestique de la Société Royale d’Agriculture de Paris 1791 ; Les vieux arbres de Normandie 1895

3 Sully était baron de Rosny

La méridienne verte – 3

La méridienne verte – 3

La méthode de mesure par triangulation

A – Principes

Les distances sont mesurées par triangulation, c’est à dire en construisant sur le terrain des triangles solidaires les uns des des autres par un côté et en déterminant leurs dimensions :

– au départ, on mesure d’abord la base d’un triangle (AC), de quelques kilomètres, à l’aide de règles. Ce sera la seule mesure de longueur sur le terrain. Suivront ensuite uniquement des mesures d’angle.

– Aux extrémités de ce segment, en A et en C, on vise le sommet du triangle en B – qui peut être par exemple le clocher d’une église ou tout autre élément surplombant le paysage et visible à une longue distance – et on détermine les deux angles α et β à l’aide d’un appareil de visée, le cercle répétiteur.

À partir de ces données, on peut calculer les longueurs des deux côtés du triangle, puis enfin l’élément de méridien, AA1

On recommence ensuite la procédure avec le triangle suivant BCD, en mesurant les angles δ et θ et ainsi de suite.

Mais dans la réalité, les choses sont nettement plus compliquées et il faut procéder à des corrections mathématiques variées, plus ou moins complexes.

B – L’appareillage de mesure

L’appareil de mesure utilisé par Delambre et Méchain a été conçu par Jean Charles de Borda (d’où son nom, « cercle de Borda ») et construit par un artisan réputé, Étienne Lenoir ; c’est un appareil portable d’environ 1 mètre de hauteur muni de deux lunettes de visée, le cercle gradué support des lunettes ayant un diamètre d’environ 40 cm.

La lunette supérieure est pointée sur un objet ; simultanément, la lunette inférieure est pointée sur le deuxième objet et on peut ainsi lire directement l’angle formé par les deux objets depuis le point de visée. En pratique, l’opération de visée est répétée plusieurs fois, d’où le nom de « cercle répétiteur » donné à cet instrument : la lunette inférieure est pointée alors sur le premier objet ce qui a pour effet de faire tourner le cercle et donc la lunette supérieure qui en est solidaire, d’un même angle. La procédure est répétée plusieurs fois en intervertissant à chaque fois les visées. L’addition de nombreuses mesures accroît très sensiblement la précision.

Illustration de Ferat pour le roman de Jules Verne «Aventures de trois russes et trois anglais en Afrique australe» (1871) : on y voit deux savants mettant en œuvre le cercle de Borda

C – Mesures et corrections

– Les signaux à viser doivent être bien visibles, faire contraste avec l’arrière-plan, de dimensions bien calculées, de façon à être réticulés facilement : trop étroits, ils seront difficilement visibles, trop larges, ils obligeront à en chercher le milieu, ce qui entraînera une approximation

– les mesures lues sur le cercle (en grades) sont converties en degrés / minutes / secondes

– la lunette inférieure n’est pas dans le même axe que la lunette supérieure (par construction), ce qui induit une erreur d’excentricité dont il faut tenir compte (pour des distances courantes la correction est de l’ordre de 0,5″ d’arc)

– il est rare de pouvoir procéder aux visées en étant au centre de la station (exemple : si le point à partir duquel doit s’effectuer la visée est un clocher, il ne sera pas possible en général de placer l’appareillage de mesure dans ce clocher → le cercle de mesure sera positionné à proximité, mais il faudra tenir compte de ce décalage, et ce, dans les 3 dimensions pour recalculer l’angle réel :

– corriger les effets de la réfraction de l’air

– En l’absence de toute correction, on aurait, en raison du relief, une succession de triangles situés dans des plans différents et au final la détermination de la longueur de la portion de méridien serait erronée :

Il est donc nécessaire de corriger les mesures brutes pour s’affranchir des différences d’altitude. Les corrections consistent à ramener la succession de triangles sur une surface sphérique qui épouse les formes du globe terrestre.

Sur le terrain, on mesure les angles (1); puis par calcul, on reporte les mesures sur une surface sphérique de référence (2)

Cette série de corrections a pour effet de définir des triangles sphériques à partir desquels on peut calculer les angles du triangle formé par les cordes de ce triangle sphérique : la somme des angles doit être la plus proche possible de 180°(1) : lorsque ce n’est pas le cas, c’est le signe de mesures peu précises.

Exemple de formule utilisée pour corriger les valeurs brutes :

Au final, les résultats des observations corrigés par calcul sont présentés sous forme de tableaux :

(1) Contrairement au triangle plan, la somme des angles d’un triangle sphérique est toujours supérieure à 180°

Sur ce sujet, voir la page Wikipedia :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Cercle_r%C3%A9p%C3%A9titeur

   
La méridienne verte – 4

La méridienne verte – 4

4 – Les anecdotes de la campagne

L’idée de mesurer le méridien et d’en déduire les dimensions de la Terre remonte aux dernières années du règne de Louis XIV : l’abbé Picard en 1670, puis Jean-Dominique Cassini (Cassini I) et Philippe de La Hire en 1683 commencent des mesures dont le but est de calculer avec précision la longueur de l’arc compris entre Dunkerque et Perpignan. Il s’agissait en même temps de cartographier la France. Le projet cartographique trouvera un premier aboutissement en 1693 et aura comme conséquence imprévue de diminuer de 15 % la superficie du royaume de France …

Les mesures se succèdent et J-D Cassini en arrivera à la conclusion que la Terre a une forme ellipsoïdale (de plus grand diamètre selon l’axe des pôles). Alors que dans le même temps, Newton et Huyghens démontrent à l’inverse, par le calcul, que la Terre est aplatie aux pôles…

Afin de lever le doute, deux expéditions sont envoyées dans le but de déterminer la longueur correspondant à un degré de latitude selon qu’on est proche de l’Équateur ou proche du pôle. La première, constituée de La Condamine, Bouguer, Godin et Jussieu, va arpenter le Pérou et la Cordillère des Andes, ce qui en fera les premiers alpinistes ; la seconde se dirigera vers les régions polaires avec comme chef de file Maupertuis. Ce dernier rapportera et exposera ses résultats en 1738 et sa conclusion est à l’opposé de celle des Cassini : la Terre est aplatie au niveau des pôles.

Pour en avoir le cœur net, une nouvelle campagne de mesure (qui fera l’objet d’une publication officielle en 1744 sous le titre « la méridienne vérifiée par de nouvelles observations« ) est organisée entre Dunkerque et Perpignan, en 1739 et 1740, par Cassini de Thury (dit Cassini III) et l’abbé La Caille. La conclusion est cette fois très claire : la Terre est aplatie aux pôles. Les triangulations effectuées par Cassini sur cette portion de territoire viennent s’ajouter à des travaux précédents et seront à l’origine de la version initiale de la carte dite « carte de Cassini », dont la première version paraît en 1744.

Près de 50 ans plus tard, la conjonction de deux facteurs va être à l’origine d’une nouvelle campagne : la demande insistante d’uniformiser le système de mesures qui remplacerait le système en place, confus et disparate, d’une part, et l’amélioration importante des moyens de mesure : le cercle répétiteur de Borda fabriqué par Étienne Lenoir spécialement pour ces mesures est alors 15 fois plus précis que les instruments antérieurs.

Un temps, l’idée de bâtir l’unité de longueur par le biais d’un pendule qui battrait la seconde avait figuré parmi les possibilités mais fut finalement abandonnée en raison des différences constatées selon la latitude et aussi pour éviter que l’unité ne dépende d’une autre unité. C’est donc l’option de rattacher la nouvelle unité aux dimensions de la Terre qui s’imposa.

Les scientifiques proposent alors de mesurer l’arc de méridien compris entre Dunkerque et Barcelone soit sur 9,5° en s’appuyant sur les observations effectuées quelques décennies auparavant par Cassini III. La mission est confiée à deux astronomes réputés, Jean Baptiste Delambre et Pierre Méchain (ce dernier a notamment contribué à enrichir le catalogue de Messier).

La campagne de mesures est une véritable aventure qui va conduire les protagonistes (les deux équipes constituées par J.B. Delambre et Méchain) à devoir faire face à de nombreuses difficultés. Il est vrai que l’époque est particulière : la révolution vient de se dérouler, les esprits sont encore enflammés, le nouveau pouvoir en place cherche à affermir son autorité et peut se montrer intraitable ou suspicieux, même vis à vis des scientifiques.

De nombreux points de repères qu’ils comptaient réutiliser, et notamment plusieurs clochers, ont été endommagés durant les années de révolution.

Delambre va mesurer l’arc partant de Dunkerque jusque Rodez qui sera le point de jonction où parviendra Méchain qui démarrera de Barcelone pour remonter vers le Nord. Les mesures commenceront en 1792, seront interrompues plusieurs fois (la Terreur) pour finalement se terminer en 1798.

L’académie à laquelle appartiennent les deux astronomes est dissoute en 1793

Delambre est exclu de la commission des poids et mesures en 1795 après qu’il eut demandé avec 5 confrères, la libération de Lavoisier …

Voici un extrait du récit de Delambre (l’orthographe de l’époque a été conservé) :

page 31

… un détachement de la garde nationale de Lagni vient visiter le château : on nous reconnaît, on se rappelle que nous avions voulu placer un signal à Montjai ; on nous enlève, on nous entraîne à travers champs par une pluie affreuse. Nous arrivons à Lagni à minuit ; je montre notre proclamation et l’ordre particulier du district de Meaux. Ces pièces étoient sans réplique.

La municipalité, pour notre propre sûreté sans doute, nous consigne à l’auberge de l’Ours avec deux fusiliers qui doivent veiller toute la nuit à notre porte.

..

Toutes les municipalités étoient en séance permanente; il falloit y comparaître. On discutoit devant nous s’il étoit prudent de nous laisser passer, et s’il ne valoit pas mieux s’assurer de nos personnes …

page 32

On trouve que nos instruments ne sont pas désignés assez clairement dans nos passeports; on veut les saisir; on exige que je les étale sur le terrain et que j’en explique l’usage. Personne n’entend la démonstration que j’en fais, et il faut la recommencer pour chaque curieux qui survient. Vainement je veux mettre dans mes intérêts deux arpenteurs qui se trouvent présens, en leur prouvant l’affinité de mes opérations avec celles dont ils font profession ; ils voient trop à la disposition des esprits qu’ils tâcheroient inutilement de parler en notre faveur. Ils n’osent donner de conclusion. Après trois heures de débats on nous force à remonter dans nos voitures que la garde armée accompagne.. On nous mène à Saint-Denys. La place étoit remplie de volontaires qui attendoïent des armes pour aller à la défense des frontières.

page 33 :

.. quelques voix proposoient un de ces moyens expéditifs si fort en usage dans ces temps, et qui tranchaient toutes les difficultés, mettoient fin à tous les doutes.

Page 42 :

Nous avions une petite armée au pied de Mont-Cassel; les avant-postes ennemis étoient près de la montagne des Chats*, où j’avois une station à laquelle je fus obligé de renoncer. En substituant Cassel, Watten et Fiefs au moulin des Chats à Hondschote et Bolle-Zèle, j’évitai les deux armées et n’eus pas besoin d’importuner le général, avec lequel je me trouvai pourtant un jour logé à Béthune.

* NdR : orthographié aujourd’hui : mont des Cats (« chat » se prononce localement « cat »)

Page 79 :

Ce qui rendoit Herment si difficile, c’est qu’on avoit abattu la partie supérieure du clocher et la lanterne où l’on s’étoit mis en 1740; il ne restoit même de la partie inférieure que la charpente, qui étoit toute à jour. Je la fis couvrir de toile blanche, parce que de Sermur ce clocher se projetoit sur des montagnes voisines. La couleur de cette toile alarmoit les habitans, qui craignoient d’avoir l’air d’arborer l’étendard de la contre-révolution. Je fis donc ajouter, d’une part, une bande rouge, et, de l’autre, une bleue. Ce moyen parut satisfaire tout le monde. Cependant, comme je m’étois pas encore bien sûr qu’on respectât long-temps mon signal tricolor où le blanc dominoit trop, je sollicitai de l’administration départementale du Puy-de-Dôme un arrêté qui mit ce signal sous la sauvegarde des autorités locales, et en effet il fut toujours respecté.

Des corréziens plutôt réfractaires :

Celui de Bort, au contraire, fut souvent insulté et sans le zèle et les soins de l’administration municipale, il n’eût pas subsisté long-temps. Le jour même où il avoit été construit, un orage affreux avoit dévasté les environs de Bort et rempli les rues de la ville jusqu’à trois pieds de hauteur, de terre et de cailloux que les eaux avoient entraînés du haut de la montagne. On avoit craint pour le pont de la Dordogne. On s’en prenoit a notre signal, qui paroissoit être la cause du désastre; on lui attribuoit encore les pluies continuelles qui, pendant près de deux mois, suspendirent toute culture dans ces montagnes. Plus d’une fois on voulut l’arracher; il en fut. de même à peu près de celui de Meimac. Heureusement ils étoient tous les deux dans des lieux écartés et d’un accès peu commode.

Page 88

J’ai fait rétablir tous les signaux et pris les moyens les plus directs pour en assurer la conservation. J’ai écrit aux administrations centrales et municipales ; j’ai requis l’emploi de l’autorité. Pour le signal de Montalet, il a fallu recourir à la force : des propos répandus, et le fanatisme, avoient tellement exaspéré les esprits qu’on détruisoit le signal aussitôt qu’il étoit relevé, et au mépris d’un avis imprimé que le département avoit fait afficher. On vient de relever ce signal et d’y poster des gardes : il n’y a plus rien à craindre. Il a fallu mettre aussi des gardes à plusieurs autres signaux. Au nord de Rodez on a été plus tranquille.

Page 92

Les savans étrangers venus pour prendre part à ces travaux étoient MM. AEneae et van Swinden députés bataves; M. Balbo, député du roi de Sardaigne remplacé depuis par M. Vassalli Eandi envoyé par le gouvernement provisoire du Piémont; M. Bugge député du roi de Danemarck; MM. Ciscar et Pédrayés députés du roi d’Espagne; M. Fabbroni, député de Toscane; M. Franchini député de la République romaine ; M. Mascheroni, député de la République cisalpine ; M. Multedo, député de la République ligurienne, et M. Trallès, député de la République helvétique.

Page 115

… Mais quand le discrédit du papier-monnaie et les retards que nous éprouvions continuellement dans les paiements nous eurent forcés à réduire toutes nos dépenses, lorsqu’enfin nous avions tout au plus de quoi payer une seule charrette attelée d’un cheval, pour nous conduire aux différentes stations …

page 258

Ce signal, semblable aux précédens, étoit placé au sommet de Mont-Chagni qui est la partie la plus élevée du Puy-de Bort. Le centre étoit à 2t d’un trou où étoit placé le signal de 1700. 0t667 en avant de ce trou, dans la direction de Meimac à .peu près, on voit deux pierres entre lesquelles étoit probablement le signal de 1740. La distance du nouveau signal au milieu entre les deux pierres étoit de 1t2222, et cette distance faisoit un angle de 298° à gauche d’Herment.

Page 261

Le signal de Meimac, semblable aux précédens, étoit placé comme en 1740, sur le sommet du mont Besson, à une bonne heure et demie de chemin de Meimac.

Sur le haut de la montagne on voit une pyramide de pierres au sommet de laquelle on a planté un arbre il y a environ vingt ans, sans doute pour la carte de France.

Le centre du nouveau signal étoit à 5t67 de celui de la pyramide, et cette distance faisoit à gauche de Bort un angle de 217° 10′ 1/2.

Les habitans des environs de Meimac et de Bort vouloient abattre ces deux signaux, qu’ils regardoient comme la cause des pluies continuelles qui tomboient depuis deux mois. Les administrations de cantons ont été obligées de faire plusieurs proclamations pour les préserver.

Le témoignage de Jerôme de Lalande, astronome, directeur de l’observatoire de Paris de 1795 à 1807 qui a recueilli les confidences de Delambre, confirme la pénibilité de la campagne de mesures :

Ce travail est pénible. Le Citoyen Delambre m écrivait de PuyViolan (NdR : dans le Cantal): «J’avais pour six heures d’ouvrage et je n’ai pu le faire qu’en dix jours. Dès le matin, je montais au signal pour n’en descendre qu’au coucher du soleil; l’auberge la plus voisine était celle de Salers. Le chemin était de trois heures pour aller, autant pour revenir et la route était la plus horrible que j’aie rencontrée jusqu ici. J’ai pris le parti de me loger dans une vacherie voisine; je dis voisine parce qu’il n’y avait que pour une heure de chemin tant le matin que le soir. Pendant les dix jours qu’a duré ce travail, je n’ai pu me déshabiller; je couchais sur quelques bottes de foin, je vivais de lait et de fromage. Presque jamais je ne pouvais apercevoir deux objets à la fois; un brouillard épais couvrait l’horizon. Pendant l’observation comme pendant les longs intervalles qu’elle me laissait, j’ai été successivement brûlé par le soleil, refroidi par le vent et trempé par la pluie. Je passais ainsi dix à douze heures de la journée exposé à toutes les intempéries de l’atmosphère; mais rien ne me contrariait tant que l’inaction»

     
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1 m = 0,513243 toise ; la toise qui se subdivise en 6 pieds de 12 pouces de 12 lignes vaut donc environ 1,95 m

Documents ou sites consultés :

– base du système métrique décimal ou mesure de l’arc du méridien rédigé par Delambre, janvier 1806, tome premier, BN https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k110604s.texteImage h

– Le procès des étoiles, Florence Trystram, Seghers, 1979

– une histoire de la méridienne, J-Pierre Martin, éditions Isoëte, 2000

– Revue de métrologie : Une grande aventure sur un méridien céleste, Louis Marquet, année : ?

https://www.science.lu/fr/mesure-terre/le-theodolite-avec-cercle-repetiteur-un-instrument-mesure-historique##

La méridienne verte – 2

La méridienne verte – 2

Sur la piste du méridien dans sa traversée de la Corrèze

Il n’est pas possible de suivre la méridienne sur son parcours, du Nord au Sud, aucune piste ou chemin n’ayant été aménagé pour le faire …

C’est aux intersections du méridien avec une route ou un chemin passant sur leur commune que les municipalités ont placé les éléments commémoratifs, constitués d’un ou plusieurs arbres maintenus par des tuteurs et d’un médaillon métallique de 20 cm de diamètre, posé sur un poteau béton de 1 m de hauteur environ :

Ce que j’ai vu (et pas vu) sur la méridienne verte (du Nord vers le Sud) :

à Couffy, il voisine avec un monolithe de forme surprenante près de l’Église et du monument aux morts :

à Courteix, bien caché dans le bois de Feyt (merci à André E. qui m’a indiqué l’emplacement) :

à St Pardoux le Neuf : non localisée …

à Ussel, en bordure de la RD 1089, direction Clermont-Ferrand. Le poteau béton et son médaillon ne semblent pas être à cet endroit …

à St Exupéry les Roches, près du hameau de Badour. L’arbre planté à l’époque est manifestement décédé !

à Mestes : pas de traces …

à Chirac-Bellevue, hameau de Vernéjoux : Le site est aménagé et propice à une halte réparatrice. C’est le seul endroit où a été mis en place un panneau d’informations, malheureusement déchiré en partie basse. Bravo à la commune !

à St Etienne la Geneste : sur la route qui part sur Chirac, mais le poteau béton et le médaillon ont disparu …

à Ste Marie Lapanouze : impossible à localiser

à Liginiac : deux médaillons commémorent l’évènement : le premier placé au sommet d’un poteau béton fiché en terre de façon classique, le second à proximité du premier mais mis en évidence sur un monolithe, en bordure de la D 20

à Sérandon : à la sortie du village, sur la D20E1 en direction du barrage de Neuvic

   
La méridienne verte – 1

La méridienne verte – 1

mis à jour : nov 2019

La méridienne verte

La « méridienne verte » consiste en une plantation d’arbres sur le tracé du méridien de Paris à l’occasion du changement de millénaire.

Ce méridien, situé 2°20’ à l’est du méridien de Greenwich qui constitue la référence des longitudes, passe par l’observatoire de Paris. Il a eu une importance bien particulière du fait qu’il est à l’origine de la définition de l’unité de longueur du système international, le mètre.

La partie comprise entre Dunkerque et Barcelone a été mesurée à plusieurs reprises, aux XVIIe et XVIIIème siècle, en dernier lieu au moment de la révolution, entre 1792 et 1798, par les astronomes Delambre et Mechain. Il s’agissait alors d’évaluer les dimensions de cette portion de méridien de façon à déterminer sa longueur totale et en même temps, définir la nouvelle unité de longueur, le mètre, qui serait prise égale à la 10 000 000e partie du quart du méridien terrestre. La connaissance de la longueur du méridien devait en outre permettre de calculer les principales distances dans le système solaire, qui découlaient des dimensions de la Terre.

En fait, cette campagne renouvelait des mesures réalisées auparavant, et notamment en 1739-1740 par Cassini (III), mais en utilisant cette fois des instruments perfectionnés, en l’occurrence le cercle de Borda : les mesures d’angles allaient être effectuées avec une précision 15 fois meilleure, l’incertitude ne dépassant pas la seconde d’arc près alors qu’elle atteignait 15″ auparavant.

La campagne de Delambre et Mechain ne fut pas exempte de difficultés de toutes sortes qui sont rapportées par Delambre dans son compte-rendu de 1806 auprès de l’Institut (voir en pages 3 et 4 l’aspect historique et scientifique de cette aventure)

Le projet de la méridienne verte visait à commémorer cette épopée à l’occasion du changement de millénaire. Il s’agissait de matérialiser le tracé du méridien en plantant des arbres sur tout son parcours, de Dunkerque jusqu’à la frontière Franco-Espagnole.

Le projet est porté par un architecte de renom Paul Chemetov et démarre en 1998. Le journal Officiel publie une circulaire pour en préciser la signalétique :

Circulaire no 2000-31 du 4 mai 2000 relative à la signalisation routière de la méridienne verte

Dans le cadre des festivités organisées pour l’an 2000, la méridienne verte, projet imaginé par l’architecte Paul Chemetov matérialisant le méridien de Paris par la plantation de milliers d’arbres entre Dunkerque et Prats-de-Mollo, est en cours de réalisation.
Le réseau routier croisera la méridienne verte sur 337 communes. Les gestionnaires de voirie qui souhaitent signaler les croisements entre la route et les plantations doivent utiliser le panneau de signalisation dont la description et les conditions d’implantation sont précisées en annexe, à l’exclusion de tout autre.
Afin que la méridienne verte soit signalée de façon uniforme sur tous les réseaux routiers et autoroutiers (nationaux, départementaux et communaux), il est demandé aux préfets de département de porter les dispositions de la présente circulaire à la connaissance du président du conseil général et des maires des communes dont le territoire est traversé par le méridien de Paris. La liste des communes concernées est diffusée sur le site internet : http ://www.2000enfrance.com/sites/meridienne/index.htm (NdR : ce lien n’est plus actif)

Le panneau E 31, dit de « localisation de tous lieux traversés par la route pour lesquels il n’existe pas de panneau spécifique », doit être utilisé pour signaler la méridienne verte, à l’exclusion de tout autre.
Les règles de composition sont les suivantes :
– panneau à fond noir et inscription blanche;
– logo vert sur fond blanc ;
– caractères en italique (alphabet L.4 entièrement en minuscules);
– panneau rétroréfléchissant.


Pour le ministre et par délégation :
La directrice de la sécurité et de la circulation routières,
I. Massin

Le Sénat s’associe au projet de façon active :

«Le méridien de Paris traversant de part en part le Palais et le Jardin du Luxembourg, le Sénat a souhaité s’associer au projet Méridienne Verte, « monument végétal pour l’an 2000 », qui est l’une des manifestations les plus emblématiques du passage au nouveau millénaire. Fidèle à sa vocation de représentant constitutionnel des « collectivités territoriales de la République », le Sénat a décidé d’offrir un arbre aux 337 communes situées le long du méridien. Il leur propose aujourd’hui de les aider à créer gratuitement leur site Internet.» (https://web.archive.org/web/20120324135539/http://14juillet.senat.fr/meridienne/)

Le méridien traverse 20 départements depuis le Dunkerque dans le Nord (59) jusqu’à Prats-de-Mollo-la-Preste dans les Pyrénées Orientales (66). La méridienne verte suit donc ce tracé qui passe en Corrèze, dans la partie Est, sur le territoire de 9 communes : Couffy s/sarsonne, Courteix, St Pardoux le Neuf, Ussel, St Exupéry les Roches, Mestes, Chirac-Bellevue, St Étienne la Geneste, Ste Marie Lapanouze, Liginiac et Sérandon.

Sur chacune de ces communes on peut s’attendre à trouver un massif cylindrique en béton d’une hauteur d’environ 1 mètre, au sommet duquel est incrusté un médaillon commémoratif standard et un ensemble de tuteurs qui maintiennent l’arbre qui a été planté à l’occasion.

En réalité, sur le terrain, on a du mal à localiser tous les poteaux béton; d’autre part les arbres plantés à l’époque n’ont pas tous survécu …

Néanmoins, il reste encore de nombreux vestiges bien identifiables, qui ont fait l’objet d’un petit reportage photographique (voir page suivante).